Les cabanes en pierres sèches, une existence universelle

Construites aux abords des champs, abritant les outils du paysan ou du vigneron, servant aussi de refuge aux bergers, les cabanes en pierres sèches portent des appellations différentes selon les régions. Il y a celles du Doubs, rattachées à une tradition viticole, il y a celles de Provence qui évoquent les bergers et des habitudes rurales, et il y a toutes les autres, aux noms étranges et situées dans des régions reculées du globe, mais qui rappellent la fonction universelle de ces constructions en pierres sèches.

Les cabordes ou les  » cabanes  » du Doubs

cabanes en pierres sèchesOn rencontre fréquemment, dans les pays de vignoble, des cabanes édifiées par les vignerons pour ranger leurs ustensiles. En Franche-Comté, dans le vignoble d’Arbois, on les appelle  » guérites « ,  » baraques « ,  » loges « , et surtout  » cabordes  » dans la région de Besançon. Ces constructions servaient de refuge aux vignerons qui devaient parcourir de longues distances pour atteindre leurs parcelles.
Les cabordes du Doubs sont fréquentes dès le XVIe siècle. Entièrement en pierres sèches, elles sont presque toujours de plan circulaire, d’un diamètre compris entre 3,5 et 6,5 mètres, et hautes de 2,5 à 5 mètres. La toiture, sans charpente, épouse la forme dune coupole, dont le profil rappelle un peu celui des clochers comtois. Elle est également constituée de pierres sèches, appelées  » laves « .
L’épaisseur de la paroi de la caborde atteint jusque 1,15 mètre d’épaisseur. La seule ouverture est la porte, dont le linteau peut être surmonté dune petite niche destinée à abriter une statuette, comme à Pirey. A l’intérieur, une ou deux grosses niches sont ménagées dans le mur. On ignore leur usage. A Besançon, une caborde dispose en outre dune cheminée.
Certaines ont adopté une architecture complètement différente. Une caborde édifiée en 1671 était non seulement dotée dune cheminée, mais aussi dune charpente en bois, comme c’était la tradition dans le vignoble de Champlitte (Haute-Saône).
De fait, la caborde n’était pas seulement destinée à l’usage viticole. Elle pouvait servir de logement permanent. Lors des conflits religieux du XVIe siècle, les cabordes de Brésille, Saint-frusquin, Vélotte et La Vèze étaient habitées. Les indésirables, proscrits, fugitifs, ou simples d’esprit trouvaient refuge dans ces édifices. On y reléguait aussi les pestiférés. Des cabordes sont même édifiées uniquement pour ceux qui ont été en contact avec eux.
Plus de 200 cabordes subsistaient encore dans la première moitié du XIXe siècle sur le seul territoire de Besançon. On en compte aujourd’hui moins dune dizaine. Quelques-unes restent à Avannes, Beure, Ornans, Pirey et à Baumes-les-Dames.
Outre leur usage viticole, les cabordes s’apparentent à un habitat temporaire et marginal, et les trop rares vestiges de ce patrimoine méritent d’être protégés.

Le village des bories

Il s’agit de l’ensemble de bories le plus important de France. La commune de Gordes regroupe en effet une vingtaine de bories sur le hameau des Savournins.
Laissées à l’abandon et morcelées, elles sont rachetées par un particulier qui les restaure au fur et à mesure. Entamées en 1969, les travaux de restauration s’achèvent en 1976. Le village est classé monument historique en 1977, puis racheté par la commune de Gordes en 1984.
Ces constructions suscitent un intérêt nouveau, une prise de conscience quelles ne suscitaient pas jadis. Au début du XXe siècle, les bories servaient aux chasseurs. Jusque une période récente, les gens utilisaient leurs vieilles pierres pour reconstruire leur maison.
Aujourd’hui, personne ne vit dans ces bories. Un musée est installé sur ce site unique. Toutes les bories du hameau ont été construites entre le XIVe et le XVIIIe siècles. Mais dans la région, certaines datent de la préhistoire.
Dans la commune de Gordes, on dénombre 400 bories, sur les 4000 recensées dans toute la Provence. Viens et Bonnieux, près de Apt, se distinguent par des ensembles significatifs. Mais on en trouve aussi dans l’arrière-pays niçois et beaucoup plus loin.

A travers la France, l’Europe et le Monde

Les orrai des Pyrénées-Orientales se disputent avec les capitales du Gard et de l’Hérault. Les cadoles du Machinais deviennent des cabanons pointus dans la région d’Aix-en-Provence. Les loges du Berry se transforment en garrottes ou caselles lors quelles passent en Dordogne et dans le Quercy. En Corse, les bories sont les varracuns, en Sardaigne les nuraghi, aux Baléares les navettes ou les talayots. Dans les Pouilles, au nord de l’Italie, ce sont les trullis. Et dans le Yucatan, au Mexique, on en trouve aussi !

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